Aménagement et valorisation des espaces ouverts aux portes de nos agglomérations

Quelles solutions pour une approche intégrée du paysage, de la mobilité douce et de l’agriculture ? L’exemple du secteur Mategnin-Feuillasse à Meyrin.

Vendredi 25.06.21 – De 13h30 à 17h00


DE QUOI PARLE-T-ON ?

Le Projet paysage d’agglomération 2012 a identifié 35 espaces à enjeux paysagers sur l’ensemble de l’agglomération franco-valdo- genevoise. Parmi eux, 10 projets de paysage prioritaires (PPP) ont été retenus. Situé sur la « façade nord » de l’aéroport de Genève, parallèlement au Jura, le « Cœur vert du Cercle de l’innovation » est l’un d’eux. Le Cœur vert désigne l’ensemble des espaces ouverts et forestiers au centre d’une couronne continue d’urbanisation qui s’étend de Saint-Genis à Ferney-Voltaire en passant par Meyrin et l’aéroport. Ce grand paysage aux composantes rurales et urbaines s’étend sur plus de 500 ha (voir carte pages 3-4), avec de multiples enjeux : la préservation des terres agricoles et des continuités biologiques, la mobilité douce ou l’aménagement des franges urbaines. Le secteur Mategnin-Feuillasse à Meyrin fait l’objet de l’une des 8 « mesures d’accompagnement paysage » (MAP) identifiées dans le périmètre d’étude du projet de paysage prioritaire du Cœur vert. Une MAP permet de promouvoir puis réaliser des actions ou mesures sectorielles, reliées par une vision d’ensemble formalisée par l’image directrice.

Cette Immersion Territoriale vous emmène à la découverte de l’une de ces mesures sectorielles réalisée à la route de Prévessin, aux abords du hameau de Mategnin.

RÉAMÉNAGEMENT DE LA ROUTE DE PRÉVESSIN

Avant la fermeture de la douane en 2012, la route cantonale de Prévessin était l’un des principaux points d’accès transfrontaliers des environs de Meyrin. Chaque jour, ce sont plus de 6’000 véhicules qui franchissaient la frontière dans un sens et dans l’autre, occasionnant des nuisances multiples pour les riverains. Son déclassement en route communale a soulevé plusieurs questions : quelle est la place et la fonction de cette route dans l’espace rural, comment la rendre accessible aux promeneur. euses au sein d’une boucle de promenade dans la campagne de Mategnin, comment mettre en valeur les fermes situées à proximité et favoriser la vente directe de leurs produits sur la route de Prévessin ?

En donnant une nouvelle vie à cette route et en lui permettant de retrouver son caractère rural, le projet dit du « Chemin des fermes » élaboré par l’atelier apaar paysage et architecture apporte des réponses concrètes à ces questions.

LA VISITE EN UN COUP D’OEIL

En prenant pour point de départ l’ancienne douane de Prévessin, la visite vous invite à parcourir la route de Prévessin jusqu’à la douane de Mategnin. L’occasion de découvrir au fil de ces 800 mètres les différentes mesures de réaménagements entreprises qui vont permettre à cette route de générer des points d’intérêts au sein des parcours de mobilité douce, ainsi que de retrouver une lecture claire de l’espace agricole : réduction du gabarit de route, suppression des bordures et des chicanes pour retrouver le caractère des routes de campagne, gestion des flux piétons et motorisés, protection des cultures, jeu de matérialités la rattachant au village de Mategnin, requalification de la douane de Prévessin.

Intervenant.e.s : 

POUR ALLER PLUS LOIN

Rencontre avec Marcellin Barthassat, architecte et urbaniste SIA FAS FSU, co-fondateur de l’atelier quatre architecture territoire et co-auteur du projet paysage d’agglomération 2008/2012.

Quels sont les grands enjeux paysagers du Grand Genève ?
Dans le contexte de notre agglomération transfrontalière franco-valdo-genevoise, la première génération du Plan paysage – devenu Projet de paysage en 2012 – nous invite à une approche différente de la relation ville/campagne. Alors que la modernité s’est employée à les opposer, ce Plan, initié dès 2008, mobilise et intègre les disciplines de la terre, du végétal et du vivant. L’idée d’une ville-paysage résulte d’une nouvelle carte qui se superpose à celle de l’urbanisme. Dès l’origine, nous l’avons imaginée comme une trame territoriale, une ossature d’espaces publics comme autant de liens qui organisent et régulent les entités bâties dans les territoires urbains ou ruraux du Grand Genève. Le Projet de paysage se doit d’être au cœur du projet métropolitain afin de rendre acceptable le développement des villes franco-valdo-genevoises et d’établir une nouvelle échelle morphologique, différente d’une accumulation de constructions fonctionnelles. Placé comme « préalable », ce Plan est à même de définir et réguler les potentiels d’urbanisation. Il s’agit là d’un défi démocratique contemporain, nécessaire au développement d’un futur satisfaisant qui puisse permettre d’accueillir dans des climats vivables et apaisés l’augmentation des populations urbaines
estimée à 70 % à l’horizon 2050.

Comment ce projet s’inscrit-il à l’échelle urbaine et environnementale de l’agglomération ?
En quoi apporte-il des solutions pour maintenir la qualité paysagère du Grand Genève ?
Au-delà des mesures de protection, la démarche veut initier des transformations locales, ou à plus vastes échelles, afin d’amplifier les qualités présentes. Par-delà ses frontières politiques, ce vaste territoire comporte les reliefs continus de la chaîne du Jura, des Préalpes et de l’Arc Alpin, ainsi qu’un lac et deux grands cours d’eau. Au cœur de cette agglomération, l’omniprésence du Léman, du Rhône et de l’Arve ont produit un système radioconcentrique qui a passablement conditionné la géographie spatiale dont nous héritons, mais aussi le dessin des infrastructures, des zones rurales et urbaines. La démarche territoire-paysage s’inscrit dans cette géomorphologie d’un patrimoine naturel et construit, mettant en valeur les catégories données des reliefs, de l’eau, du végétal, des réseaux viaires et du tissu bâti. Pour comprendre la restauration et la transformation des paysages que nous proposons, nous nous sommes intéressés aux caractéristiques territoriales naturelles, agricoles et urbaines à relier. Comment opérer des connexions entre le réel, l’existant et le futur du projet ? Il nous semble que la programmation et la gouvernance globale pour l’aménagement de l’agglomération seraient alors régulées qualitativement. Toutefois, cette démarche « paysage » a mis en évidence des éléments contradictoires qui ont ouvert une vaste réflexion et un débat sur le statut des espaces verts.

Dans quelles directions doit-on penser aujourd’hui le rapport ville/campagne au sein du Grand Genève ?
En revisitant le concept régional de « trame verte orthogonale » du premier plan de zones des années 1930-36, conçue et dessinée par Alfred Bodmer et Maurice Braillard, les acteurs du projet de paysage se sont distancés de toute idée d’opposition ville/campagne pour s’investir à restituer des relations entre les espaces ouverts et urbanisés. La campagne comme nouvelle « monumentalité » de la ville ? Tenter de produire un dessin régional et plus organique à des fins de maîtrise et d’équilibre entre les entités urbaines. Le principe du « maillage territorial» vise à développer des porosités et des connectivités pour offrir aux quartiers urbanisés une proximité avec la campagne. Appliqué dans l’aménagement de nouveaux quartiers, tels les Communaux d’Ambilly ou les Cherpines, ce maillage vert structure l’urbanisation avec des aires renaturées, des parcs, des espaces-rues arborisés, un urbanisme amplement végétalisé. Dans un contexte de croissance ou de concentration urbaine, cela nécessite une nouvelle définition spatiale de l’espace public commun.

Comment redéfinir les relations entre les espaces construits, la nature et l’agriculture ?
L’imbrication de ces trois facteurs dans un bassin de vie transfrontalier, avec des systèmes de gouvernance différents, relève bien la complexité des relations. Car la ville est devenue « métropolitaine », c’est-à-dire territoriale, notamment par l’extension extraordinaire des modes de déplacements et de communications. Pour les espaces urbains construits, la réponse se situe dans un
équilibre « entre les pleins et les vides » ainsi qu’une requalification généralisée des espaces publics. Ceux-ci nécessitant d’intégrer le substrat des sols, l’arbre dans la ville, l’eau, l’espace piétons et la mobilité douce. La régénération du réseau viaire devrait permettre une transformation des infrastructures de voiries motorisées en véritable espace-rue! Lesquelles offriraient par exemple une intensification d’arborisation, de nature à établir des continuités biologiques (contrats corridors) avec les massifs boisés. La démarche paysage trouve également son sens dans l’un de ses piliers que constitue le développement des fonctionnalités de l’agriculture, par une politique locale de circuit court, garantissant une viabilité économique et de services (souveraineté et sécurité alimentaire). L’ensemble de ces dimensions est évidemment indissociable du projet d’agglomération. C’est dans la mise en valeur d’une agriculture de proximité, de corridors biologiques et d’espaces publics urbains que se jouent les enjeux climatiques pour le Grand Genève, avec l’espoir d’une ville-paysage résilience et durable.

Comment associer les collectivités, la population et les différents acteurs en présence dans la mise en œuvre de ces projets ?
Après quatre générations du projet d’agglomération, le processus demeure marqué par une grande complexité et de nombreux obstacles : législations et outils d’aménagement différents d’une région à l’autre. Se pose alors la question d’une gouvernance transfrontalière. Le Grand Genève est encore perçu comme abstrait et peu compréhensible par l’ensemble des populations régionales. Malgré l’existence d’un Forum citoyen, l’organisation plus localisée du débat demeure difficile. Peut-être qu’au travers des Mesures d’aménagement paysager (MAP), identifiées dans plusieurs projets de paysage prioritaire (PPP) – notamment sur le Cœur vert du Cercle de l’innovation (2013), ou le Bois de Rosses, Annemasse Est (2014) –, la méthode proposée pourrait offrir aux collectivités locales et aux citoyens une compréhension et une approche plus concrète. Certes singulière, elle peut constituer de possibles portes d’entrée – du particulier au général – pour mieux faire saisir les enjeux du projet du Grand Genève transfrontalier et ses implications.


Infos pratiques

13h30 Rendez-vous 1 situé côté suisse au terminus du tram 14, arrêt Meyrin-Gravière
14h00 Rendez-vous 2 situé côté français à l’ancienne douane de la route de Prévessin (accès en transport public via bus n°64, arrêt Prévessin, Ancienne-Douane)
14h00 - 15h30 Visite
15h30 – 16h15 Moment d’échange avec les intervenant.es
16h15 – 17h00 Apéritif
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